Les chats sont très habiles à cacher leur douleur, mais en tant que vétérinaires félins, nous nous améliorons à trouver les indices qui indiquent la douleur. En tant que praticienne féline, j’ai une grande passion pour la détection et le traitement de la douleur chez les chats. Grâce à ma récente participation à de nombreuses conférences de l’American Association of Feline Practitioners, j’ai pu améliorer à la fois mes compétences et ma boîte à outils contre la douleur. Certaines méthodes peuvent être utilisées pour aider les gardiens de chats à évaluer la douleur aiguë et chronique à la maison. Par exemple, des recherches impressionnantes de la Faculté de Médecine Véterérinaire (FMV) de l’UdeM ont amené le développement de l’échelle des grimaces de chat, qui peut être consultée en ligne à www.felinegrimacescale.com. À La Clinique Vétérinaire des Chats, nous utilisons quotidiennement ce nouvel outil et éduquons nos clients sur cette avancée passionnante.

LE POURQUOI

Personne ne veut que son chat bien-aimé souffre. Les clients sont souvent troublés lorsqu’après un examen médical complet, nous discutons de nos constatations médicales concernant la douleur. « Comment ne l’avons-nous pas vue ? » Les chats sont très rusés dans l’art de masquer la douleur.

Pourquoi une espèce évoluerait-elle de manière à diminuer les signes extérieurs de douleur ? La réponse réside dans le fait que les prédateurs attaqueront les plus faibles de la meute. Donc, si vous êtes un animal dont la niche écologique est dans la catégorie des proies, vous apprenez que pour survivre, vous devez cacher votre douleur. Bien que nous considérions les chats principalement comme des prédateurs, ils peuvent également être des proies. Par conséquent, ils font tout leur possible pour éviter de montrer de la douleur.

Le comportement naturel des chats était encore aggravé par la mentalité en médecine vétérinaire selon laquelle un chat est un petit chien. En conséquence, on utilisait les mêmes outils pour détecter la douleur chez les chats que chez les chiens. En d’autres termes, on ne trouvait pas de douleur chez nos patients félins parce qu’on regardait de la mauvaise façon. Un bon exemple de ce manque de détection s’est produit lors du grand débat du dégriffage. En tant que vétérinaires, nous ne pouvions pas nous mettre d’accord si le dégriffage provoquait une douleur chronique. Il y avait plusieurs articles bien cités affirmant que ce n’était pas le cas. Cependant, beaucoup d’entre nous en pratique mixte et féline étaient convaincus par ce que nous voyions chez nos patients dégriffés qu’une douleur était en fait causée. Ensuite vient une progression de notre capacité à détecter la douleur. Nous savons maintenant que le dégriffage peut causer des douleurs chroniques. (Veuillez noter que nous sommes une clinique strictement CONTRE LE DÉGRIFFAGE.)

En médecine, la probabilité de détecter un problème augmentera considérablement une fois que vous commencerez à le rechercher. Cela ne veut pas dire que nous inventons les problèmes. La douleur féline était toujours là – nous ne la recherchions tout simplement pas.

Alors maintenant que nous avons de meilleurs outils, de meilleurs systèmes de notation, de meilleurs traitements, que pouvons-nous faire de plus ?

Nous devons enseigner aux propriétaires de chats ce que nous avons appris. Lorsque nous, en tant que vétérinaires, pouvons enseigner à nos clients ce qu’il faut rechercher, vous guider dans la détection précoce des signes cliniques, puis vous faire évaluer si nos traitements fonctionnent à la maison, ensemble, nous serons en mesure de diminuer la douleur de nos chats bien-aimés.

LE QUOI: LA PHYSIOLOGIE DE LA DOULEUR

Afin de comprendre la douleur, nous devons mieux comprendre comment la douleur se produit.

Commençons par nous familiariser avec les différents types de douleur.

Premièrement, la douleur peut être aiguë, c’est-à-dire qu’elle survient très rapidement. La douleur aiguë existe pour nous apprendre à ne pas répéter la même erreur. Par exemple, si un chat ressent une douleur à la patte en marchant sur une surface chaude telle que la cuisinière, il réagira en sautant de la surface douloureuse et, espérons-le, apprendra à l’éviter plus tard. C’est ce qu’on appelle la douleur adaptative, car elle nous apprend à éviter certaines situations qui peuvent entraîner de la douleur.

Disons maintenant que le même chat ne reçoit pas la gestion de la douleur et le traitement appropriés de ses pattes brûlées. À ce stade, nous passons de la douleur aiguë à la douleur chronique.

La douleur chronique est plus difficile à diagnostiquer et à traiter. Lorsqu’un chat souffre de douleur chronique, de moins en moins de stimulus douloureux sont nécessaires pour provoquer une plus grande réponse à la douleur dans le cerveau. En conséquence, nous pouvons nous retrouver avec un phénomène connu sous le nom de windup ou le phénomène de la sommation temporelle.  Au long d’une partie de la chaîne qui fournit les informations au système nerveux central, connue sous le nom de corne de la racine dorsale, de nombreux produits chimiques sont impliqués dans une cascade d’amplification. Étant donné que les chats sont si doués pour cacher leur douleur, ils sont généralement déjà dans cet état de sommation temporelle au moment où ils sont amenés au vétérinaire.

LE QUAND

Les chats peuvent souffrir de douleurs à de nombreuses étapes de leur vie.

Lorsqu’un chaton est soumis à une douleur extrême, cela peut l’amener à avoir un seuil de douleur plus bas tout au long de sa vie. Un traitement inadéquat de la douleur au cours des interventions chirurgicales tôt dans la vie, telle que la stérilisation, peut entraîner ce phénomène. Un contrôle de la douleur avant, pendant et après l’intervention est donc crucial et ne doit jamais être présenté comme facultatif.

À l’âge de trois ans, on estime que 70 pour cent des chats souffrent d’un certain niveau de maladie dentaire. Nous savons que toute douleur au visage ou à la bouche peut être plus intense que la douleur dans d’autres parties du corps – pensez à votre dernière carie. Alors que les chiens alertent leurs propriétaires avec leur haleine excessivement malodorante, les chats ne semblent pas affectés par l’halitose au même degré. Encore une fois, la douleur dentaire passe souvent inaperçue, même pour le gardien de chat le plus bien intentionné. Malheureusement, les maladies dentaires deviendront alors plus douloureuses que si elles ne sont pas traitées. L’inflammation des gencives peut entraîner une inflammation sévère des tissus à l’arrière de la bouche au fil du temps.

Un autre type de douleur que nous voyons souvent chez les chats est la douleur abdominale. Nous pensons maintenant que beaucoup de ces lécheurs de ventre persistants sont en fait des chats qui souffrent de douleurs abdominales chroniques. L’une des principales causes de ceci est la constipation. Il est important pour vous, en tant que gardien de chat, de savoir à quoi ressemblent les selles de chat normal. (Nous nous référons au tableau des selles de Purina dans notre clinique.) Un autre facteur est l’obésité. La graisse abdominale est un organe, ce qui signifie qu’elle produit des hormones qui peuvent entraîner une inflammation. Le résultat ? Les gros chats sont plus susceptibles d’avoir mal au ventre.

Nous pensions autrefois que l’arthrite ne survenait que chez les chats âgés. Nous savons maintenant que les jeunes chats peuvent également être touchés.

Les chats souffrant de maladie rénale ont en fait souvent des articulations douloureuses. Ils se déshydratent donc leurs articulations ne sont pas bien lubrifiées. De plus, les maladies rénales entraînent une perte de masse musculaire maigre.

Donc, malheureusement, la douleur chez les chats est partout autour de nous, elle n’est tout simplement pas détectée.

LE COMMENT

Heureusement, nous avons de nouveaux outils pour détecter la douleur. Beaucoup d’entre eux peuvent être partagés avec les gardiens de chats afin qu’ensemble, nous puissions mieux évaluer la douleur à la maison et à la clinique.

Un de ces outils, développé par la Faculté de Médecine Vétérinaire de l’Université de Montréal, est un moyen d’évaluer les détails du visage des chats pour nous aider à détecter la douleur aiguë. Pour plus d’informations à ce sujet, «l’échelle des grimaces de chat » peut être consultée en ligne sur www.felinegrimacescale.com.

Lorsqu’il s’agit d’évaluer la douleur buccale à la maison, les gardiens de chats peuvent également ouvrir doucement la bouche de leur chat pour rechercher tout signe de gonflement ou d’inflammation. Nous vous recommandons de le faire tous les mois. Si des signes sont détectés, il y a de fortes chances que votre chat souffre de douleurs buccales, ce qui signifie qu’il est temps de le faire voir par un vétérinaire. Grâce à votre détection précoce des signes cliniques, votre équipe vétérinaire sera alors en mesure d’évaluer le niveau de douleur et le besoin de médicaments et autres traitements avant que le problème ne progresse.

Les douleurs musculaires et articulaires sont une autre forme de douleur que les gardiens de chat peuvent rechercher à la maison. En effet, certaines méthodes d’évaluation de ce type de douleur ne peuvent être réalisées qu’à domicile. L’évaluation de la démarche, par exemple, est presque impossible à faire en clinique. Nos patients vont simplement s’allonger sur le sol et refuser de bouger. À la maison, cependant, en plaçant un cellulaire au niveau de la marche du chat et en faisant en sorte que deux personnes utilisent des croquettes pour encourager à faire bouger le chat, nous pouvons obtenir des vidéos précieuses montrant si une ou plusieurs pattes sont hors de la normale. Cela peut être un indicateur majeur de douleur arthritique ou même de blessure.

L’observation à domicile peut également inclure l’observation de la mobilité de votre chat lorsqu’il saute. Trouvez-vous plus de marques de griffes sur vos meubles ? Votre chat a-t-il maintenant besoin d’un tabouret pour se rendre à son aire de repos préférée ? Comment gère-t-il les escaliers ? Est-ce qu’il se tourne plusieurs fois avant de se coucher ? Néglige-t-il son toilettage ?

CHANGEMENT DE CHATTITUDE

De nombreuses variations comportementales peuvent résulter de la douleur chronique. Nous trouvons souvent que l’urination inappropriée chez les chats plus âgés est liée à des douleurs articulaires. Par exemple, ces douleurs peuvent rendre difficile ou douloureux le fait d’atteindre l’endroit où se trouve leur boîte à litière. Ils peuvent même avoir du mal à entrer dans la boîte en raison de la hauteur de la paroi de la boîte. Vous pouvez également commencer à trouver plus d’urine sur le sol près de la boîte qu’à l’intérieur de la boîte. Cela peut être dû au fait qu’ils ne sont plus capables de s’accroupir.

Les chats sont naturellement très flexibles, comme démontré lorsqu’ils se toilettent, mais à mesure que la douleur augmente, ils peuvent ne plus être en mesure de s’étirer pour atteindre les endroits les plus éloignés de leur corps. Cela conduit à un pelage emmêlé et négligé qui est souvent gras. Rechercher des changements d’apparence similaires chez votre chat peut être un autre moyen de détecter la douleur à la maison.

TRAITEMENT

Les chats n’ont pas besoin de souffrir du niveau de douleur auxquels beaucoup d’entre eux sont actuellement confrontés. Ensemble, en équipe, nous pouvons détecter les signes cliniques afin de soulager la douleur de nos félins bien-aimés.

Nous utilisons une approche multimodale pour traiter la douleur chez les chats. Cela comprend l’adaptation de l’environnement domestique, la gestion du poids, l’utilisation appropriée et constante de combinaisons de médicaments, un massage doux des muscles affectés et une thérapie au laser de faible niveau sur les articulations et les muscles avoisinants. Notre objectif est d’optimiser la qualité de vie de votre chat. Chaque patient est unique et il n’y a pas de « taille unique » en matière de gestion de la douleur.

SOMMAIRE

La douleur aiguë et chronique chez le chat est sous-diagnostiquée. Les chats cachent souvent leur douleur. Des formations avancées et de nouveaux outils nous permettent de mieux détecter et traiter leur douleur. Prenez un rendez-vous avec nous pour un examen complet d’évaluation de la douleur.

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